Si les Hodhs m’étaient (ra)contés

mar, 05/30/2017 - 15:53

Finalement, le Premier ministre, Yahya ould Hademine, n’est allé qu’en quatre localités : Fam Lekhdheiratt, Tintane, Aweinatt Ezbil et Djigueni. Sa campagne dans les Hodhs s’est ainsi contentée de deux moughataas, sur la dizaine que comptent les deux wilayas. Sur le chemin de Tintane, son cortège a contourné Aïoun, frustrant ses habitants d’une petite escale. L’argument tribal semble pourtant avoir motivé tous les arrêts premier-ministériels : il plaidait largement en faveur de la belle cité. A Fam Lekhdheiratt, première étape, Ould Hademine a rendu visite au secrétaire général du ministère de la Fonction publique, Ahmed ould Deh, considéré comme un précieux allié, dans une localité où la politique se fait et se défait, depuis le département de Tamchekett dont le député, Taleb Moustaph ould Elbou (chef général des Laghlal) et son neveu, Mohamed Lemine ould Khattri, ex- directeur général de la Sonimex, ne sont pas venus à l’accueil du PM. La colère du jeune DG, lors de son débarquement intempestif, suite à l’affaire des engrais, n’est, manifestement, pas encore retombée. La jamaa politique du député et de son neveu accuse le PM d’être derrière l’envoi d’une équipe de l’inspection générale d’Etat à la société d’import/export que Sidi Mohamed Ould Khattri dirigeait.

A Tintane, le PM passe chez le sénateur de la ville, Cheibetta Ould Khouyatt, et, pour ne pas faire de jaloux, séjourne trente-six heures dans la maison de l’ancien député de Tawassoul redevenu UPR, Sidi Mohamed ould Seyidi. Une ancienne somptueuse villa qui appartenait à Cheikh Sid ‘Ahmed ould Baba qui l’a revendue – signe des temps… – au richissime grossiste pharmaceutique qui l’a réaménagée en auberge. Au Hodh El Gharbi, le PM a été accueilli presqu’officiellement. Durant tout son séjour dans cette wilaya, le wali et son cabinet, plus escorte de gendarmerie et de police, étaient à son service. Organisation de plusieurs audiences avant de « raser » les murs d’Aïoun et de filer vers Aweinatt Zbil, à quelque quatre-vingt-huit kilomètres plus à l’Est, pour juste un arrêt de quelques dizaines de minutes. Comme son collègue de Tamchekett, le député d’Aïoun, Vadili ould El Waghf, ancien questeur de l’Assemblée nationale, était absent à la rencontre d’Aweinatt. Après cette dernière localité, le PM fait directement cap sur son village de Djigueni où les péripéties de l’organisation d’un grand meeting populaire commencent. Tous les moyens sont bons et tout y passe, notamment la fibre tribale et les alliances qu’elle suscite. Avec toute la puissance de l‘Etat. Et l’argent qui fait sauter toutes les serrures. Même les plus rebelles.

A Djigueni, le PM ne serait cependant pas très populaire. Pour preuve, la mairie est tombée, aux dernières municipales, dans l’escarcelle des islamistes. Beaucoup des cadres issus de cette ville ne sont pas de son groupe politique. Ses ennemis traditionnels pactisent avec le diable, pour démontrer, à qui veut les écouter, que Yahya ould Hademine est loin d’être prophète en son fief. Au final et à défaut de rassemblements populaires, jugés moyens, en termes d’affluence, le PM a quand même réalisé l’essentiel, en faisant passer, dès la première escale, le message pour lequel tout ce périple semble avoir été pensé et organisé : le pouvoir actuel ne quittera pas les affaires en 2019. Peut-être que la confusion servira à ce que ni les systèmes, ni les hommes, ni les moyens n’ont permis de servir…

Ben Abdalla

 

Le Calame