
Le président sénégalais Macky Sall a créé la polémique en déclarant, samedi 26 mai, que les tirailleurs sénégalais « avaient droit à des desserts » pendant la colonisation française, signe, selon lui, de la bonne relation entre son pays et la France. Les Sénégalais bénéficiaient-ils réellement d'un traitement de faveur ?
La phrase lâchée par le président sénégalais Macky Sall le 26 mai, lors de la soirée de lancement du premier tome de son livre Conviction républicaine, a créé la polémique. Dans une vidéo de la rencontre, le président explique : « Nous avons une relation particulière avec la France. C’est vrai, ils nous ont colonisés, il y a eu une décolonisation pacifique. Mais ils ont toujours respecté les Sénégalais. Parce que le régiment des tirailleurs sénégalais, quand ils étaient dans les casernes, ils avaient droit à des desserts pendant que d’autres Africains n’en avaient pas. »
Cette digression de Macky Sall sur les relations entre la France et le Sénégal a suscité une vague d’indignation sur les réseaux sociaux et dans les médias, notamment sénégalais. Sur Twitter, certains internautes ont ainsi estimé que l’intervention de Macky Sall est une véritable « honte » pour le pays, tandis que d’autres y voient une simple maladresse.
Écoutez @Macky_Sall qui parle des bienfaits de la colonisation française (4:05) et des desserts amicaux des français pour les tirailleurs sénégalais (5:05). Je suis sidérée et affligée. Le lien pour écouter, pour ceux qui comme moi ont d’abord douté : https://t.co/2R5XP7TZRI… pic.twitter.com/kTSdzT2OSf
— Nathalie Yamb (@Nath_Yamb) May 26, 2018
Pas de base historique
Les soldats des troupes coloniales françaises de nationalité sénégalaise auraient-ils eu un traitement de faveur par rapport aux autres Africains ?
D’un point de vue historique, ils étaient une des composantes des tirailleurs sénégalais, qui regroupaient en fait des soldats venus de toute l’Afrique noire. Julien Fargettas, chercheur et auteur du livre Les tirailleurs sénégalais : Les soldats noirs entre légendes et réalités 1939-1945, explique que la seule spécificité sénégalaise résidait dans le fait qu’une partie de la population, celle née dans les Quatre communes (Rufisque, Saint-Louis, Gorée, Dakar), disposait de la nationalité française.
« Ces jeunes-là faisaient alors leur service militaire dans les unités d’infanterie coloniale, et non dans celles des tirailleurs sénégalais », précise l’historien. « Jusqu’au milieu des années 1950, les tirailleurs ne disposent pas de la citoyenneté française, et n’ont pas les mêmes conditions d’avancement, ni les mêmes responsabilités que les soldats français. Mais, en temps de guerre, l’expérience du feu les rapproche et ils ont tendance à vivre dans les mêmes conditions », raconte le chercheur, qui se dit « un peu étonné par ces déclarations ».
JEUNEAFRIQUE