Soucieux de moderniser Nouakchott et d’en faire une ville un tant soit peu viable, le gouvernement a décidé de débloquer cinquante milliards d’ouguiyas MRO. Plusieurs départements ministériels sont concernés par cette mise à niveau dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle a tardé. Vieille de soixante-six ans – sa première pierre fut posée le 5 mars 1958 par feu Mokhtar Ould Daddah et Gérard Jaquet, ministre de la France d’Outre-Mer – notre capitale a l’air de tout, sauf d’une ville moderne. Sans plan directeur ni schéma d’urbanisation, elle navigue à vue depuis sa fondation ou, plutôt, depuis 1978. Avant cette date, elle était en effet plus ou moins structurée, dotée d’un système d’assainissement et ses nouveaux quartiers lotis avec un minimum d’organisation. Mais depuis, c’est l’anarchie presque totale. Avec l’argent facile qui commençait à couler à flot, de nouveaux lotissements ont poussé comme des champignons. Les distributions de terrains partout et nulle part sont devenues le lot quotidien de tous les ministres des Finances qui se sont succédé à la tête d’un département devenu le plus juteux de la République. À tel point qu’il n’est pas rare de voir une villa cossue construite au milieu d’un désert sans borne, dépourvue d’eau, d’électricité et encore moins de route pour y accéder. Le laisser- aller y atteint un tel degré que Nouakchott doit sans doute être la seule ville au monde où se côtoient, dans ses quartiers les plus chics, villas somptueuses, baraques, tentes, dépôts de briques, salles de mariage, garages pour réparations de voitures, salons de coiffure, échoppes... Le tout dans un désordre indescriptible et en l’absence totale des services d’urbanisme ainsi que ceux des communes plus enclins à collecter les taxe qu’à vérifier les autorisations de construire. La réhabilitation de la ville devrait commencer par là. Le reste suivra.
Ahmed Ould Cheikh
Le Calame