A l’âge de 29 ans, (cette année), Le Calame, ce journal mythique garde encore ses traits de jeunesse.
Face aux chênes, comme le roseau, il a résisté sans plier une seule fois. Interdit à trois reprises, saisi 34 fois (Guinness des records de la saisie des journaux dans le pays), il est resté toujours le même, un trait d’union entre l’opinion et le public.
Certifié Iso 2009 en 2008, ce journal de référence refuse catégoriquement de plier aux exigences de la corruption, aux supplices du manque de moyens et aux aléas climatiques de toutes les politiques qui ont malmenées les libertés d’opinion. C’est son esprit critique et son indépendance indomptables qui échappent à toutes pressions ce qui fait de lui un journal pas comme les autres.
Ni blanc, ni noir, ni de gauche ni de droite, insoumis, le Calame qui « a horreur » qu’on le qualifie de journal de l’opposition est un journal d’opposition. Une opposition aveugle à tout ce qui touche de près ou de loin au droit de la liberté d’expression.
L’intransigeance de ce journal qui refuse de prendre de l‘âge, lui assure depuis 1995, la même fraicheur, la même senteur, la même et invariable trajectoire éditoriale.
Un parcours sans faute même faute de moyens.
De très grands noms sont passés par là. De très grandes plumes aussi. Les articles de ce journal sont toujours restés limpides. Et depuis sa naissance jusqu’à cette date, les textes de ses articles ont toujours jonglé avec les mots et « parapente » au-dessus d’un vocabulaire toujours de plus en plus maitrisé.
Habib ould Mahfoud (la littérature des littératures) un génie dont les mots se marient toujours avec les génies des verbes puisé dans une inspiration qui dépasse l’imagination du commun des lecteurs en est la plus grande légende.
En janvier 2013 Sylvain Fourcassier un journaliste du « Le Monde Diplomatique », un confrère de renommée internationale disait de Habib Ould Mahfoudh -(disparu à l’âge de 41 ans )- « qu’il avait laissé inconsolable une génération d’admirateurs et d’amis ». Et moi, pour le compléter d’ajouter que Habib ould Mahfoudh avait surtout laissé derrière lui des lecteurs orphelins à qui il avait donné tout le goût-du-goût d’une renaissance de l’écriture dont lui seul avait le secret.
Et puisque que c’est de lui qu’il s’agit, le 17 juillet 2013, pour décrire le profil de cet intellectuel qui plane dessus de la littérature francophone, feu Abdoulaye ciré Bâ, (une autre plume qui avait toujours défié la gravité de la gravité de la langue française) disait de Habib oud Mahfoudh que c’était « Le plus maure des intellectuels de la Francophonie et le plus universel des troubadours maures».
Le Calame, un passé, un présent et un futur.
Le Calame, c’était, c’est et il le restera sans nul doute l’Histoire des grands pionniers du Far West de la presse écrite « mauritanide ». Une histoire chantée comme une épopée par des grandes plumes de ce pays, où, la littérature et la pédagogie de la langue française se battent pour survivre.
En Juin 1993, feu Habib ould Mahfoudh, (un Larousse et un lexique de la langue française), feu Abdallahi ould Eboumedienne (la force de frappe de la rédaction), Hindou mint Ainina, (la reine du donner et du savoir de la langue française), feu Mohamed Fall ould Oumère, (la presse dans toute sa forme aristocratique) et Ahmed Ould Cheikh (grand comme trois pommes mais un géant éditorialiste) avaient dans une complicité à responsabilité illimitée lancé « Le Calame », ce journal dont le nom est gravé en or dans les annales de l’histoire de la presse voix des sans voix.
Pour mesurer la Grandeur de ce journal qui a progressé contre tous les vents violents de la dictature et de l’oppression médiatique des régimes qui se sont succédés, il faut simplement rappeler ce que certains ont de lui. En écrivant ce qu’il appelle un « petit mot » pour marquer le vingtième anniversaire du Calame,
Mohamed Vall Ould Hamed écrivait le 5 novembre 2015, « quand Ahmed Ould Cheikh m’avait demandé d’écrire quelque chose sur ce jurnal « j’avais senti une forte bouffée d’amitié m’opprimer le cœur ».
Et à l’occasion de la parution du millième numéro de ce grand journal de référence, celui qui prenait toujours son café le matin sur une terrasse le journal Le Calame entre les mains, (Qu’Allah l’accueille son Saint Paradis) Ahmed Hamza avait écrit : « Au moment où va paraître le millième numéro du journal « Le Calame », je ne peux qu’adresser mes vives et sincères félicitations à ce journal, à son équipe fondatrice soudée autour de feu Habib Ould Mahfoudh qui, malgré les aléas politiques, financiers et professionnels, a pu mettre en place les fonts baptismaux de cet organe de la presse indépendante porte-flambeau de la libre pensée et de la libre expression dans le pays ».
Le Calame, qui a ouvert ses colonnes aux plus talentueux des talentueux journalistes et écrivains comme Sneiba El Kory (qui chronique entre nous par sa finesse rédactionnelle), Ahmed Salem ould El Moctar Cheddad (la sagesse des Tribunes de ce journal) vit en luttant contre la mort de la presse écrite. Il résiste pour dire à chacun de ses milliers de fidèles lecteurs qui sont tous des intellectuels de première ligne, que la bataille sur le front de la liberté de la Presse, c’est une complicité de génération léguée par les génies de la plume aux génies de la lecture.
Mohamed Ould Chighali
Journaliste indépendant
(Chroniqueur du Calame)