ETUDE DE CAS. Ould Diay, un Homme, un But, une bonne ou mauvaise foi ?

lun, 09/16/2024 - 18:09

Même si elle est constitutionnelle, elle est devenue une tradition chez nous, comme d’ailleurs dans d’autres pays reculés. Pour ne pas déroger à cette règle exigée par les textes qui régissent la vie politique et publique de ce pays, le Premier ministre, Mokhtar Ould Diay avait présenté le mercredi 4 septembre 2024, les grandes lignes de la politique générale du gouvernement.

L’événement s’était déroulé dans l’hémicycle d’une Assemblée Nationale que Ould Diaye connait bien et dont il garde certainement encore aujourd’hui un très mauvais souvenir.

Le 25 Janvier 2019 (sous le régime de Ould Abdel Aziz). Ould Diay, qui était venu devant les députés défendre la loi des finances de cette année-là, avait encaissé des insultes et des critiques de tous genres proférés contre sa propre personne par le Député Biram Dah Ould Abeid.

A l’époque, Ould Diay, puissant ministre des finances sous le régime d’un très puissant Chef d’Etat (Ould Abdel Aziz), n’était pas aimé du tout. Au contraire, - je dirais même -, qu’il était détesté et parfois même haï par beaucoup de mauritaniens aussi bien du milieu politique que du milieu industriel, commercial et financier.

Quatre ans et huit mois après cet incident malheureux qui avait fait dire à Biram Dah Ould Abeid, ce qu’il ne devait pas dire et ce que Ould Diay ne méritait pas vraiment (même si certains pensent le contraire), Ould Diay semble toujours garder les stigmates du passé de sa personnalité publique que beaucoup de mauritaniens toutes tendances confondues n’arrivent pas à digérer.

Ould Diay, bon, mauvais ou les deux à la fois ?

Je crois l’avoir dit moi-même dans un précédent article, Il faut dire, que l’atterrissage de Ould Diay à la Primature relève de l’inimaginable. Certains mauritaniens, aussi bien de la classe politique que du milieu de l’électorat de Ould Ghazouani, se demandent encore jusqu’à présent qu’est ce qui a bien pu pousser Ould Ghazouani, (très bas dans les sondages), à croire que Ould Diay (très bas aussi dans les sondages) serait l’Homme de la situation. Pour certains, c’est clair.

Ould Ghazouani, qui va franchir la ligne d’arrivée en 2029, a besoin d’un « Beni OUI-OUI » pour se remplir davantage les poches et pour renflouer ses comptes qui explosent déjà de l’argent mal acquit.

Pour d’autres, par contre, Ould Ghazouani qui, durant cinq années avait laissé chacun faire ce qu’il voulait, s’est décidé finalement à mettre fin à l’anarchie épouvantable qui règne dans les milieux du détournement des deniers publics à cause de l’étendue de la corruption sous toutes ses formes.

Ce qui est certain, c’est que Ould Diay, (celui qui cache son visage derrière un masque de bronze comme disent certains), ne jouera pas au style de Ould Bilal son prédécesseur. Ould Bilal, un homme honnête, travailleur et consciencieux) mais un homme qui était très affaibli par sa timidité et la naïveté qui lui faisait croire que les avertissements, les mise-en-garde et les menaces pouvaient faire changer les choses.

Au cours de la séance de l’Assemblée Nationale, qui s’était donc déroulée en présence de membres du Gouvernement et de hauts fonctionnaires de l’Etat, le Premier Ministre Ould Diay avait engagé la responsabilité de son gouvernement pour la mise en place une politique taillée sur la mesure du programme électoral du Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani.

Le discours de Ould Diay, donnait aux mauritaniens l’impression d’un son de mélodie déjà entendu. Un refrain qu’avaient entonnés avant lui Ould Cheikh Sidiya et Ould Bilal deux premiers ministres qui ont été incapables de venir à bout du vol d’une bande organisée de pilleurs et de détournements de deniers publics dont les membres (confondus dans le même intérêt) sont des politiciens, des hauts cadres et des parlementaires qui s’appuient sur des hommes d’affaires, des entrepreneurs et des responsables d’établissements publics pour dilapider les moyens de l’Etat.

Le nouveau Premier Ministre, promet en cinq points d’achever le travail de ses prédécesseurs, un travail de lutte contre la gabegie, le détournement et la corruption qui deviennent cancérogènes dans tous les rouages de l’Etat.

Et il était évident que Ould Diay, le « mal-aimé » allait avoir du mal à « vendre » son projet de « désinfection » du système, un système auquel il appartient et un système qui est rongé de l’intérieur par la corruption et l’ingérence de chefs traditionnels religieux ou tribaux insatiables, mais qui est surtout empoisonné par des influenceurs politiques de poids très lourds qui passent partout et par tous les moyens pour « racler » les sous d’un Etat dont les habitants estimés à 5.000.000 tirent tous le diable par la queue.

C’est d’ailleurs pourquoi, certains députés n’ont pas laissé échapper l’occasion pour dire à Ould Diay, (face-to-face), qu’il est très mal placé pour faire croire aux mauritaniens qu’avec lui, les choses vont changer. Parce que simplement pour eux, Ould Diay est le mal en personne. Ould Diay victime de tirs groupés.

Ce débat pour le vote du programme de Ould Diay avait parfois donné lieu à des interventions violentes et dénigrantes de la part de quelques députés. On n’était pas revenu au genre d’insultes du Député « incontrôlable » Biram Dah Ould Abeid de 2019, mais presque.

Les députés de l’Assemblée Nationale, sont allés en ordre dispersés pour critiquer le programme proposé par le Premier Ministre du second quinquennat de Ghazouani ; Les négros-mauritaniens ont rappelé au Premier Ministre que le problème du Passif humanitaire reste posé dans sa forme comme dans son fond ; les harratines ne sont pas satisfaits du niveau de performance dans la lutte contre l’esclavage et la traite des êtres humains ; les opposants ont dit clairement qu’avec un Ould Diaye à la Primature, les vols, les détournements et la gabegie auront encore de beaux jours devant eux ; et les mécontents de la Majorité ont donné un son de cloche pour attirer l’attention sur ce qui pourrait arriver si Ould Diay était investi d’une mission comme celle dont l’avait investi le prédécesseur de l’actuel président.

Face à de très nombreux ennemis de son propre camp et des ennemis de l’environnement de la majorité politique au pouvoir, Ould Diay, le « mal-aimé » va-t-il réussir à donner satisfaction au président qui l’a choisi à la surprise générale de tous ? Beaucoup comme moi pensent que oui. Si donc c’était le cas, Mokhtar Ould Diay va-t-il donner satisfaction à Ould Ghazouani dans le bon ou dans le mauvais sens ? Toute la question est là !

Si Ould Diay va donner satisfaction à Ould Ghazouani dans le bon sens, cela signifierait qu’il va déclarer la guerre au Clan. Et, Ould Diaye le sait bien, le Clan ne badine pas avec ceux qui sont très regardants sur ce qui se fait, par qui il est fait et pour qui il est fait.

Donc soit ça passe, soit ça casse ! Si ça passe, beaucoup de membres du « Clan » se retrouveront derrière les grilles c’est évident, et si ça casse, c’est Ould Diaye qui se retrouvera à la Casse et pour de bon. Le « Clan » a ses règles.

Mohamed Ould Chighali
 

Journaliste indépendant.